(Call girl / Call clik 4) "Les chevaliers du fiel"
Cela fait six heures désormais que je suis dans l’appartement de Belleville chez Nico. Je suis incapable de dire ce dont on a parlé, mais on a fait que ca. Les bouteilles se dressent fièrement sur la table basse. Beaucoup sont vides. Il fait encore nuit dehors. Un faible halo de lumière lunaire vibre sur le zinc des toits de la capitale. Les derniers instants de la nuit. Encore deux ou trois heures. Je n’ai pourtant aucune envie de dormir.
- Alors il en reste un peu ?
- Oh mec, ca va là on va pas dormir.
- T’inquiète ah, quelques vodkas suffiront. Bon et puis tu ne vas garder le reste pour le réveil. Allez come on !
Je m’occupe de servir deux vodkas RB. Nico tente, lui, de garder le parallélisme des lignes. Il s’y affaire le petit. Prends le temps. Méthodique. Précautionneux. On a l’impression qu’il est en train de préparer le repas de son propre enfant. Non là il est attentif car c’est de lui dont il s’agit - et Dieu sait que dans ce genre de situation nous sommes assez egocentrique-,de nous plus précisément. Il est un peu plus de sept heures déjà. Aucun bruit de circulation au dehors. Les parisiens semblent dormir. Pourtant, nous souhaitons aller toujours plus loin, plus haut, plus fort. Et retrouver les quelques parigos toujours debouts, même s’ils sont à quatre pattes. Surtout même si elles le sont.
Aucun message sur le téléphone, pas trop de connaissance debout à cette heure. Quelle solution ? Prendre le scooter et descendre vers le cœur de la ville. C’est peut être ici bas que nous retrouverons un peu de chaleur humaine et de quoi satisfaire nos envies.
Les casques sur la tête, nos jambes enfourchent le 125 de Nico. « T’es sûr que tu peux conduire là ? T’inquiète j’suis au top. Pas moyen de croiser la marée chaussée par ici, ils ne sont que sur des gros points de circulation ». Incroyables effets de l’alcool et du trésor cellophané qui nous permet de croire que nous sommes invincibles, forts et au delà de tout écart de conduite. Les deux roues de 11 pouces percutent les pavés les uns après les autres, République et ses travaux nous obligent à faire un détour mais Nico ne l’entend pas ainsi. « Non mais fais pas le con. On va se faire arrêter comme ca ». Il ne m’entend sûrement pas. Il se trouve peut être dans un jeu virtuel sauf que là on a qu’une seule vie -mais avec plusieurs nuits, ce qui me réchauffe un peu le cœur-. Rue du temple, rue Turbigo, ah non détour à gauche in extremis ca sera donc la rue Beaubourg. Mais où m’emmène t-il ? Droite, gauche re-droite, ca sera la rue Rambuteau. Il me demande de descendre, pose son pied sur la béquille, met son scoot en équilibre. pas le temps de penser à l’antivol, et me sort tout de go « Tu connais le 41 ? ». « Le quoi ? Non pas entendu parlé. C’est quoi ? » « Ah ouais t’as perdu ton temps toi. Mais crois moi. Une fois que tu connaitras ce lieu tu en parleras à tout le monde … ».
La rue Quincampoix et ses immeubles de travioles, quelques graph au pochoir et la fameuse porte de ce numéro 41. Mon index appuie fébrilement dessus -comme si je voulais reprendre la situation en main-. Un vasistas s’ouvre. Deux grands yeux blancs qui balaient de droite à gauche. « Ok ».
Une fois les vestes déposées, nous passons devant une première salle avec un plasma en son haut qui diffuse un porno relativement daté. Un goût d'ancien qui fait frémir deux couples qui se délectent en s’embrassant corps et âmes. Aucune inhibition. Leurs corps s’entrelacent alors qu’une tierce personne vient s’approcher d’eux tout en abaissant sa main vers ce qui lui procurera un triste plaisir égoïste. L’endroit a un côté sordide, glauque. Mais pour autant il est hautement irrésistible pour y passer la fin de nuit, mais sûrement plus pour y déverser son fiel accumulé tout au long de la semaine. Nous empruntons l’escalier métallique, baissons les têtes, l’escalier vire à droite, quelques marches puis la scène. Nous traversons un grand nuage de fumée –oui car dans cet endroit nous pouvons encore cloper tranquillement- puis les altostratus traversés, nous arrivons dans la zone de turbulences …
Bises ( à suivre )
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